Les conditions pour pouvoir bénéficier d’un dépôt de dessins et modèles sont prévues dans le CPI.
- Nouveauté et caractère propre :
L’article L511-2 du CPI prévoit que « seul peut être protégé le dessin ou modèle qui est nouveau et présente un caractère propre. »
Le premier critère est celui de la nouveauté. Il implique deux considérations :
- Qu’il n’y ait pas de dessins et modèles identiques divulgués avant la date du dépôt, c’est-à-dire un droit d’un tiers déjà communiqué au public ou déposé (article L511-3 du CPI). Cette condition permet d’écarter les copies des formes préexistantes.
- Que le créateur du dessin et modèle à déposer n’ait pas déjà divulgué sa création, en l’exposant, l’utilisant, la commercialisant avant le dépôt. Il existe cependant deux exceptions pour les créateurs : si la divulgation a lieu par ses actions ou via un comportement abusif de tiers à son encontre dans les 12 mois avant le dépôt, le critère de la nouveauté est toujours rempli (article L511-6 du CPI).
Ensuite, le second critère impose que le dessin et modèle présente un caractère propre, c’est-à-dire que ses caractéristiques doivent différer des autres dessins et modèles. Il ne doit pas donner une impression de déjà vu : l’impression visuelle d’ensemble doit être différente de celle suscitée par les autres dessins et modèles existants (article L511-4 du CPI). Cette condition permet d’écarter quant à elle les imitations par formes similaires.
Cette dernière condition implique donc que le créateur doit avoir réalisé un réel effort pour se différencier des autres dessins et modèles. La loi propose tout de même de tenir compte « de la liberté laissée au créateur dans la réalisation du dessin ou modèle », qui dépend des contraintes techniques et commerciales, pour l’appréciation de ce critère (article L511-4 du CPI). L’appréciation ne requiert pas de caractère esthétique ni d’originalité.
Aussi, il est important d’effectuer des recherches d’antériorité avant de procéder au dépôt, afin de voir si le dessin et modèle n’a pas déjà été déposé ou utilisé par un tiers ou bien de s’assurer que le dessin et modèle comporte des différences significatives des autres droits existants. La difficulté est qu’il n’y a pas de limites de temps ou de territoire : les droits antérieurs bloquants peuvent remonter loin dans le passé et avoir été divulgués dans n’importe quel coin du monde.
L’examen de l’Institut National de la Propriété Intellectuelle (INPI) ne regarde que si le dessin et modèle n’est pas contraire à l’ordre public ou aux bonnes mœurs. L’examen des autres conditions est laissé à l’appréciation souveraine des juges du fond. Il n’examine pas les droits antérieurs. Cependant, le risque est de détenir un droit fragile, puisque tout tiers peut en demander la nullité devant le juge s’il porte atteinte à leurs droits ou tout simplement, car le dessin et modèle ne répond pas aux critères selon l’article L512-4 du CPI.
- Visibilité de la création :
Une condition qui découle de l’article L511-5 du CPI est que les éléments faisant l’objet du dépôt doivent être visibles, puisque la protection se fait sur l’apparence. Les éléments à protéger doivent être apparents lors de l’utilisation normale du produit. Par exemple, si une pièce d’un élément complexe n’est visible que quand on ouvre le produit pour son entretien ou sa réparation, elle n’est pas protégeable.
- Ordre public et bonnes mœurs :
Ensuite, il ne doit pas non plus porter atteinte à l’ordre public et aux bonnes mœurs, d’après l’article L511-7 du CPI. L’INPI refuserait par exemple des dessins et modèles présentant un caractère blasphématoire, injurieux, obscène, raciste ou discriminatoire.
- Exclusion des formes exclusivement imposées par la technique et des éléments d’interconnexion :
L’article 511-8 du CPI prévoit cette exclusion.
Les caractéristiques ou la forme du produit ne doivent pas être imposées par sa fonction technique. La raison est que la fonction technique est protégeable par le droit des brevets. Pour savoir si la forme est dictée par la fonction technique, les juges emploient le critère de la multiplicité des formes : si plusieurs formes étaient possibles, l’apparence du produit n’est alors pas imposée exclusivement par la technique.
Les pièces d’interconnexion ne sont pas non plus protégeables. Ce sont des éléments qui doivent être associés à un autre produit pour que chacun puisse remplir sa fonction dans le cadre d’une utilisation normale. Le but de cette disposition est de permettre l’interopérabilité des produits adaptables ou compatibles pour libéraliser le marché. L’article prévoit cependant une exception pour les produits modulaires, comme les pièces de jeu de construction, ou encore des accessoires de rangement, qui peuvent faire l’objet de protection.